Désertification des villages : fatalité ou épiphénomène Français ?

15 août 2025    Rédaction   Aucun commentaire   À la une du WeekEnd    Désertification des villages, France    1488 vues

Dans une petite commune de l’Est de la France, les fermetures de commerces s’enchaînent. Moins visibles qu’un plan social, elles traduisent une lente érosion de la vie locale.

Le village est calme, sûrement trop calme. Sur la place principale, les portes d’une ancienne auto-école restent closes depuis plusieurs mois.
À deux pas de là, l’enseigne d’un fleuriste jadis populaire a désormais disparu.

Ce scénario n’est pas une fiction, mais le quotidien d’une petite commune de 2 000 habitants, en pleine désertification commerciale et sociale.

En deux ans à peine, les signes du malaise se sont multipliés : l’une des deux banques a fermé, tout comme l’un des deux bars-restaurants.

Une des deux boulangeries a mis la clé sous la porte, laissant derrière elle un pan de convivialité sur le carreau.

« Il y a encore quelques années, on avait tout à portée de main. Aujourd’hui, on compte ce qu’il reste sur les doigts de la main » soupire Jean-Michel, retraité du village depuis 1985.

« Quand une boulangerie ferme, c’est plus qu’un fournil qui s’éteint : c’est un petit monde qui disparaît à jamais « .

Ces fermetures peuvent sembler anecdotiques prises isolément, mais elles dessinent une réalité plus préoccupante : un tissu local qui s’effrite, des services qui s’éloignent, et un quotidien qui se complique pour les habitants, notamment les plus âgés ou ceux qui ne peuvent pas se déplacer facilement.

Car derrière chaque rideau baissé, c’est une histoire qui s’arrête : moins de clients, moins de passage, moins de rentabilité.

Et parfois, simplement une fatigue trop grande chez les commerçants pour continuer à tenir bon, seuls, face à des tendances, fiscales, juridiques, administratives, de plus en plus lourdes.

»Les jeunes partent, les anciens restent. Mais sans renouvellement de population, qui veut racheter un commerce ici ? On ne fait plus envie », confie une commerçante encore en activité.

Quand le centre du village se vide la commune, comme beaucoup d’autres en France, fait face à un déséquilibre territorial.

Tandis que les métropoles concentrent toujours plus de services, d’emplois et de vie, les villages et les petites villes périphériques se battent pour rester vivants. Une lutte souvent inégale.

Certaines municipalités tentent d’agir : incitations fiscales pour les repreneurs, aides à l’installation, projets de revitalisation du centre-bourg… Mais les moyens manquent.

Et surtout, il est difficile de recréer du lien social quand les lieux de vie ferment les uns après les autres.

« Quand on n’a plus de bar, plus de boulangerie, plus de café, où voulez-vous que les gens se retrouvent ? Chez eux, seuls », alerte un élu local.

Faut-il pour autant céder au fatalisme ?

Pas nécessairement. Des idées circulent, mais qui demandent du temps, de l’énergie… et un minimum de soutien.

Encourager le télétravail, valoriser les produits locaux, maintenir les services publics, développer l’offre de soins, offrir des services numériques, renforcer les transports, communiquer et valoriser les atouts ou encore soutenir les nouveaux arrivants, sont les grandes lignes de la bonne stratégie.

Un avenir à réinventer ?

En attendant, le bourg continue de se vider doucement, sans drame ni fracas, mais avec cette impression tenace d’un monde qui se retire comme les vagues avant le reflux d’un tsunami, sans que personne ne s’en aperçoive vraiment.

« Ce n’est pas qu’on ne veut pas vivre ici. C’est qu’on nous enlève peu à peu les moyens de le faire » constat fataliste.

Pourtant la lutte contre la désertification, un défi de longue haleine, est possible avec des initiatives locales, et un soutien des pouvoirs publics, pour redonner vie à de nombreux villages et le sourire aux habitants.

José Sitbon